1 - Olivier Poivre d'Arvor
Olivier Poivre d'Arvor livre ses réflexions à l'occasion de la Conférence des Nations Unies sur l'Océan. Ses principaux problèmes viennent du changement climatique, dit l'Envoyé spécial de la France à cette conférence, mais non de problèmes causés seulement par l'homme. "Il sera possible de réparer la biodiversité ou restaurer des pratiques plus vertueuses mis la question climatique laisse perplexe". La baisse des émissions de gaz à effet de serre est trop faible et le réchauffement planétaire fait déjà fondre le Groenland et l'Antarctique.
"La prévision de la montée des eaux - horizon 2100- est passée de 70 cm à 1,10 m . Un milliard de personnes au Pacifique seront appelées à se déplacer. L'océan représente pour le vivant au sens large la santé d'aujourd'hui et de demain. Le défi de l'océan est né récemment en 1982 dans l'esprit des gens de mer, lorsque la communauté internationale a décidé de créer des zones économiques exclusives lors de la Convention de Montego Bay. Les risques demeurent et la volonté des responsables c'est d'atténuer la pression humaine sur l'océan. La France possédant avec les USA tout d'abord, le second domaine maritime mondial , avec le Costa Rica cette conférence aura de l'importance et de l'intérêt !"
Une soixantaine de Chefs d'Etat y ont participé comme autant d'acteurs de l'économie de la finance bleue, des ONG mondiales et des populations littorales des bords de mer.
2500 scientifiques et chercheurs ont participé à cet One Ocean Science Congress, organisé par Ifremer et le CNRS. C'est aussi la première conférence de l'ONC organisée en France depuis la COP21 en 2015, et la première conférence sous l'élection du Président Trump.
L'océan devient un sujet géopolitique majeur . Les zones maritimes sont le lieu des transports des marchandises et des informations par cables sous marins et seront la source des futures énergies marines. Enjeux désormais majeurs de la puissance des Etats et des gouvernements. Les Américains ont déjà indiqué la voie de leurs préférences à Suez, Panama, au Groenland et à l'ambition des grands fonds marins encore vierges en de nombreux endroits.
Et le Délégué français ajoute : "l'eau c'est 80 % de notre organisme et de la surface océane du monde, et en réalité nous sommes l'EAU comme nous sommes l'océan !"
Savoir que l'acidification des océans et des plastiques est et demeure une menace pour la vie naturelle est convenue. Réguler la pêche, décarboner le transport maritime, restaurer le vivant, commencent à s'observer comme "un code de la route" accepté par tous les pays permettant à l'océan de se regénérer
La Conférence de Nice organisera la première pré-conférence signataire des Etats réunis en COP dès 2026. ce sera une nouvelle page pour l'océan. Surveillée par drones ou satellites, en saisissant les enjeux océaniques chacun sera en position de force, car l'océan est une ressource stratégique qu'il ne faut pas laisser aux mains d'acteurs malhonnêtes ou spéculateurs.
La question des plastiques en mer d'une durée de vie illimitée est une question difficile pour l'heure en raison des positions des pays producteurs de pétrole.
Qu'en dire des zones marines protégées ? Le correspondant rapporte qu'en France on a dépassé l'objectif de 30 % des espaces maritimes fixés par la COP 15, de la Biodiversité de Montréal avec les territoires ultra marins mais ce chiffre est plus compliqué à obtenir chez nous pour le cas, dans le Golfe de Gascogne, zone de pêche et de travail professionnel.
En France, nous importons 80 % des poissons de consommation, difficile d'accentuer cette croissance à l'heure cependant de la menace des navires usines étrangers sur le front des mers du globe.
Autre sujet concernant la mer, les projets d'exploitation minière du président américain : il faut un code minier international mais depuis 2022, la décision de l'accorder est encore en discussion. 32 pays sont favorables à ce jour d'une interdiction proposée par le président Macron, ou sollicitent par défaut un moratoire et encore une pause de précaution.
La tentation de s'affranchir de la réglementation internationale est-elle satisfaisante ?
La tentation de contournement des lois existe. Exemple de Nauru, une petite île tentée par un accord avec une entreprise en fraude. Voulant exploiter les fonds marins, le phosphate sous marin s'étant épuisé, l'ile a perdu tout attrait pour le tourisme et la seule solution restante est désormais d'exploiter les ressources au péril de détruire la richesse sous marine de l'endroit.
Que dire encore de la grande mission Neptune au sommet de SOS - Océan à Paris ?
Nous ne connaissons que très peu l'océan, répond l'ambassadeur. Seulement 5% de sa surface est exploitée, et 0,1 % de la masse liquide océanique a été visitée par l'homme. Neptune voudrait pouvoir visiter d'ici 2040 la quasi intégralité de l'océan . Le Pacte européen pour l'océan présenté à Nice le 7 juin engagera les Etats membres mais aussi par delà l'Europe, les Instituts océanographiques, le CNES et les Agences spatiales, et les puissances maritimes mondiales comme la Norvège, Monaco, le Brésil, l'Inde, la Chine et bien davantage.
Ces exploration auront aussi un objectif économique vertueux, découvrir de nouvelles molécules et de nouvelles ressources génétiques en vue d'applications médicales et industrielles. Un océan, comme un bien commun, un objectif de la France sans oublier de partager ces dividendes avec les pays où se feraient ces découvertes marines dans le monde. Pour beaucoup de développement en cours et en perspective. En pays maritime comme nous cet enjeu marin ne peut laisser indifférent les populations entourant la baie de Biscaye !
(Olivier Poivre d'Arvor, auteur de "Deux étés par an", roman publié chez Stock)
2 - Sylvia Earle, Océanographe américaine, mondialement reconnue, était attendue à Nice. A 89 ans, cette chercheuse, biologiste, exploratrice des bas fonds de la mer, est née en 1935 autour de Philadelphie, A 3 ans elle pénètre l'océan avec un plaisir radieux qui surprend sa famille. Son nom est aussi connu que celui du commandant Cousteau et Emile Gagnan chez nous avec 27 Doctorats honorifiques et une centaine de Distinctions du monde entier. On la surnomme la Jeanne d'Arc des océans, son jardin personnel et commun sera l'océan. Toujours et tous les jours l'océan. Docteur sur les algues, à Duke en 1966, elle est nommée cheffe de mission dans une base sous marine masculine. On la suit avec intérêt, elle ne semble être impressionnée par la gent masculine, Ses mots d'esprit lui enlève quelque raison de douter de sa force.
La voilà au milieu des baleines, végétarienne, se demandant ce qu'elle mangeait mais QUI elle pouvait sacrifier en mangeant ? Elle a dirigé dans sa vie une centaine de missions, passé sept mille heures sous l'eau, Sa compétence est saluée par toutes les tendances politiques du pays, Elle rejoint la direction de l'Agence américaine d'Observation océanographique, et atmosphérique, l'équivalent de Météo France et Ifremer réunis chez nous.
Elle a descendu dans les profondeurs à 381 mètres en plongée solitaire en 1979 dans un scaphandre non relié à la surface. Et depuis dans un sous marin à 1000 mètres Deep Rover. Nommée directrice scientifique de la NOAA elle a eu trois enfants et mené ainsi plusieurs vies sur terre et en profondeur marine.
En 2003, elle organise à Los Cabos au Mexique une conférence scientifique sur "Empêcher la fin des océans" ?
Elle lance encore en 2009 la "Mission Blue", une ONG qui promeut la préservation des océans, et crée des dizaines de -Hope spots- dans le monde, ou des relais d'espoir dans lesquels la biodiversité se réinstalle . Point de solutions en des zones où les coraux ont déjà disparu dans le monde, mais la scientifique espère inverser la tendance. En 2014 Netflix lui consacre le documentaire connu dans les cercles marins, "Mission Blue", l'un des premiers produits par la plateforme. Sa collection de 50 000 algues marines est conservée à Harvard, à l'université Duke et à Berkeley. Une démonstration grandeur nature du bouleversement écologique produit depuis les années 1960 et le travail de titan mené par cette femme.
30 % des mers à conserver pour l'obtention de l'oxygène que nous respirons, régulons et tempérons le climat, assurons notre subsistance alimentaire et fournissons de nombreuses subsistances pour fabriquer les médicaments". Des ambitions colossales.
"Lorsque nous cherchons la vie sur une autre planète, dit la biologiste, nous nous posons une question, où est l'eau? Pendant que sur terre... nous détruisons la vie sur les océans !"
Oui nous savons quoi faire ! Comprenez aussi, savoir ce qui ne doit pas être fait, désormais !